mardi 25 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 24


Redevenus petits comme le soleil d'hiver, nous avons la chance de suivre sa course, de grandir à nouveau, emplis de la lumière croissante...
Fin de ce voyage au coeur de la vie !

lundi 24 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 23


Autour de l'arbre pimpant auquel chacun a donné un peu de soi, se rassemblent les enfants de tous âges décidés à se donner du temps les uns aux autres, à se serrer les coudes, à se compter au bout de cette année de la nuit la plus longue à la nuit la plus longue... Ils ont suivi la courbe du soleil, son ascendance attendue, sa lente décroissance redoutée, et les voilà prêts à allumer le nouveau soleil, à croître avec la nouvelle vie qui se révèle, celle de Jésus, celle de chacun...

dimanche 23 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 22


De l'arbre engourdi de froid se détachent les dernières gouttes de sève, salées comme des larmes...

vendredi 21 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 21


Corps de bois livré au froid...
Hêtre nu muet la nuit....
Portez nous là-haut !

Ma main droite ignore ce que fait ma main gauche

Lorsque j'ouvre mon tiroir à gants, aux premiers jours de froid, je me réjouis d'en trouver une quantité rassurante. Hélas ! à y voir de plus près, je n'ai d'autres ressources que de renoncer à réchauffer ma main droite : je dispose d'une collection de gants gauches abandonnés par leur jumeau ! Qu'est-ce à dire ? A-t-on contrarié chez moi une disposition au gauchisme ? Cette fatalité est-elle d'un sinistre présage ? Mettrait-on en cause ma dextérité ?...
Je m'en lave la main !

Calendrier de l'Avent 20


Pourquoi le sapin, roi des forêts, reçoit-il des couronnes superflues ? Pourquoi le garnit-on de décorations, de feuilles et de fruits artificiels, quand tant d'autres arbres, dans nos pays tempérés, offrent leur élégante nudité à nos regards ? Ces arbres nus se révèlent, d'ailleurs, être d'excellents dessinateurs, découpant ombres et lumières avec une précision aigüe sur l'herbe blanchie par le givre ? Dans les nuits glaciales où brillent la lune, leur ramure se découpe avec une netteté saisissante sur la façade pâlie des maisons...
M'interrogeant sur les mutations du verbe "Enguirlander", je viens d'ouvrir le Littré pour y découvrir ce joli sens figuré : "Circonvenir quelqu'un par de belles paroles". Notre sapin trop sapé est-il circonvenu par nos décorations, et sapé de ce fait dans ses fondements créatifs ?

Il laisse à l'arbre nu dans la nuit froide, réplique de l'enfant nu dans la mangeoire, cette seule ressource : créer.

jeudi 20 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 19


Le père Noël, s'il existe, ne se pose-t-il pas de questions ?
Les hommes ne peuvent-ils pas le laisser seul dans son repère nordique, tranquille pour préparer la fête dans l'obscurité de son atelier ?
Non, il leur faut l'incarner maladroitement, le multiplier en chair et en os aux quatre coins des rues, le suspendre, figuré par des mannequins de chiffons, aux toits et aux fenêtres des maisons, le posséder, le manipuler, et, se faisant, étouffer ce qui fait sa beauté : sa furtive apparition entre ciel et terre, entre rêve et réel, entre enfance et maturité !
Infantilisme, contraire exact de l'esprit d'enfance...

mardi 18 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 18


Noël, temps donné à l'enfant qui est en nous, qui veut de l'air, de la lumière, de l'attention, comme le bébé qui pousse et force le passage, déchirant les chairs de la maman.

lundi 17 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 17


Les souvenirs s'assemblent en une mélodie libre qui vit en nous comme un feu crépitant...

Calendrier de l'Avent 16


Dans la nuit de l'oubli flottent nos souvenirs épars... Saisissons comme une chance les heures sombres de l'hiver pour partir à la pêche ! peut-être sera-t-elle miraculeuse ?
La mémoire, épluchée comme un fruit, nous offrira d'étranges saveurs...

dimanche 16 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 15


De la mystérieuse naissance de fortune à Bethléem à l'accouchement moderne dans nos cliniques aseptisées, une énergie incroyable se dégage et se diffuse du torrent de vie jaillissant des corps de femmes livrés à la douleur féconde, libérant le petit être assoiffé d'air, de lait et de chaleur...

vendredi 14 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 14



... Les gestes toujours plus émouvants qui nous permettent de dénuder les corps, frétillants, frémissants, renaissants, reconnaissants... les referons-nous à Noël, au plus froid de la nuit ? Mettrons-nous bas masques et carapaces ? Trouverons-nous des coeurs nus ?

Calendrier de l'Avent 13


Comme les arbres mis à nu par le gel et le vent, nous referons les gestes du démaillotage : déshabiller un objet après l'avoir camouflé dans des feuilles,
comme la petite fille habille et déshabille sans se lasser la poupée étonnée.
Se protéger, se dépouiller, en infinie tension...

jeudi 13 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 12


Partons à la recherche de sensations perdues
voyage au coeur de la mémoire
vol Air Memory 2512
destination : Soi-Même..

mardi 11 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 11


Où trouver assez d'yeux pour percevoir la lumière de la nuit ?

Amitié

Pour Laurence et Malika.

À moitié chemin, mi-chemin, loin des bases, amarres larguées, retentit un cri doux, venu des fonds marins de mémoire... Des noms amis, des voix montant de si loin, des timbres vibrant d'une autre vie, laissée là-bas sans fond, m'appellent... Sirènes à la surface, renouant la chaîne des années défilées décousues, ornant et brodant les jours dépareillés, me retrouvent des amies de classe, non revues depuis la 4ème ou la 3ème !
Cadeau d'amitié oubliée : les vieilles enfants se retrouvent un beau jour, et trente années s'effacent. Nos vies, voies séparées. Rencontre, voix retrouvées...

Calendrier de l'Avent 10


Légers et lumineux, sans âge, heureux d'être vivants quand le soleil se terre, grimpons le long des guirlandes, lianes brillantes...

dimanche 9 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 9


Nous sommes tous des lutins volant vers l'arbre de nos rêves...

Calendrier de l'Avent 8


Nos fenêtres s'ouvrent sur un rideau figé et opaque d'obscurité. Il nous faut inventer un printemps intérieur...

samedi 8 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 7


À l'affût des éclats tranchants de couleurs et de lumières trouant les obscurités vertes, dessinant un autre arbre, irréel...

vendredi 7 décembre 2007

calendrier de l'Avent 6


Comme pour un grand sacrifice nocturne, les fruits du travail humain sont jetés dans le brasier des boutiques, et se retrouvent emballés, cubes et parallélépipèdes de toutes tailles, brillants, chatoyants, clinquants, dans les bras des porteurs d'offrandes...

jeudi 6 décembre 2007

Le Temps de l'Homme


Ce titre prometteur sert d'enseigne à un salon de coiffure et barbier qui s'est ouvert il y a quelques mois à Ferrières en Bray, juste au-dessus de la voie ferrée, en face du château à tourelles...
Karine Gaurat m'y a invitée à exposer une vingtaine de tableaux, et cela m'a amenée à refléchir aux rapports entre chevelure et peinture :
Oui, la force qui me pousse à peindre ressemble bien à celle, inlassable et silencieuse, qui force nos cheveux à pousser, pousser, quoi que nous fassions. Ils nous échappent, se développent à l'extérieur de nous, se nourrissant pourtant dans notre corps, puisant dans nos ressources, trahissant nos humeurs, nos mutations.
Nôtres et autres à la fois, ces cheveux vivent comme des pulsions à qui nous accordons une plus ou moins grande part de liberté, irruption sauvage que nous canalisons vaille que vaille, que nous maquillons, soignons, taillons, lissons, bouclons, selon l'image à laquelle nous voudrions coller.
N'en est-il pas de même de cet élan qui s'exprime sur la toile ou le papier, jaillissant de moi, nourri de mes sentiments et de mes souvenirs, de ce qui s'offre à moi, primordial et pourtant si longtemps retenu ?

Horaires d'ouverture : jeudi, vendredi, samedi, dimanche, lundi, 9h30-12h30 et 14h-18h et plus sur rendez-vous au 02 35 09 62 77 ou 06 15 97 70 56

calendrier de l'Avent 5


Les hommes, imitant les arbres lentement dépouillés par l'automne, sentent le besoin de s'éfeuiller, de lâcher les fruits de leur travail, comme un gage de réveil dans la clarté des vitrines, semailles pour le printemps futur...

mercredi 5 décembre 2007

calendrier de l'Avent 4


Trois pommes, trois rescapées, s'accrochent à leur branche, notes en suspens...

mardi 4 décembre 2007

Calendrier de l'Avent 3


Apprendre l'attente patiente, dans les brouillards.

lundi 3 décembre 2007

calendrier de l'Avent 2


Et si nous déballions Noël, étouffé sous les paquets-cadeaux ?


dimanche 2 décembre 2007

calendrier de l'Avent 1


À ceux qui ne veulent plus fêter Noël, explorons les sources de la fête...

Par une journée sans lumière, animée par le souffle continuel d'un vent lassant, éclaboussée d'une pluie infatigable, s'ouvre le temps de l'Avent, son besoin de lumières, de couleurs, de chants, de remue-ménage pour ne pas s'endormir dans ces jours les plus courts...
À la recherche du sens de Noël depuis des années, dans différentes directions, je me propose de publier, jour après jour jusqu'au 25 décembre, des pages de ce carnet de Noël qui contient les images de cette exploration...


vendredi 30 novembre 2007

Vouloir d'achat

On parle du pouvoir d'achat. Qui pense au vouloir d'achat ?
Nous arrivons au mois de décembre, à la période de Noël qui, dans ma campagne, voit se développer depuis quelques années une débauche de décors kitsches à base de guirlandes électriques qui nous dessinent des paysages disneyiens à souhait, plus ou moins réussis.... On dirait qu'une compétition s'installe, d'une maison à l'autre, à celui qui en mettra le plus. La quantité compte ici, en effet...
On se croirait dans un feuilleton américain de bas de gamme !
La nuit dévorante en ces jours de décembre inquiète comme la réalité que tous fuient devant l'écran de télévision qui projette l'illusion d'un monde pailleté et clignotant. Les jardins endimanchés en ces temps de Noël deviennent la projection des décors de télé, et ça rassure, ça rassure...
Pouvoir d'achat ? Ces mètres de guirlandes, ces kilos de wateurs, sont-ils d'indispensables écrans entre la splendeur de la nuit et nos esprits en quête de lumière ?
Les réponses SMS toutes faites que propose NRJ à toute heure du jour contre un euro cinquante, sont-elles bien utiles ? Cette radio a-t-elle si bien fait son travail que ses auditeurs ne sont même plus capables de trouver eux-mêmes une réponse aux messages qu'ils reçoivent?

Qui parlera du pouvoir de non-achat, du pouvoir de bon achat, du vouloir d'achat ?

jeudi 29 novembre 2007

Femme au foyer


Matin sombre fin novembre.
Une étincelle brûle en moi, arrachée à la nuit, au rêve fort qui me poursuit, m'éclaire...
De mon foyer les enfants sont partis, et, dans les cheminées, des braises fatiguées, grises, demandent à s'éteindre... Brindilles, picotements, soufflets les font rougir paresseusement. Longs moments tête-à-tête pour les forcer à réagir, à rejaillir, à pétiller et à flamber ! lorsqu'elles se tordent enfin, lumineuses, ne pas les oublier, ces capricieuses, il leur faut grignoter et croquer sans arrêt...
La cour traversée, - je suis entre deux feux-, le poêle de l'atelier m'offre sans fard ses cendres. Si légères qu'elles semblent sans matière, fuyantes comme les souvenirs dont on fait deuil sans y penser. Tout est à refaire chaque matin, rite suranné : papiers, brindilles, bûches, étincelles, et, selon les jours, crépitement immédiat ou fumeux démarrage, léger embrasement ou poussif étouffement... Tiens, c'est comme mon travail !
Flammes, âmes toujours avides, nous sommes en commerce : bons soins contre chaleur, lumière, et vos musiques silencieuses...

dimanche 25 novembre 2007

Fouillons





Nous n'aurons pas fini de filer la trame des fibres follement mêlées,
impudemment exposées en un enroulement propre au vertige,
pas fini d'y lire les liens.
C'est la houleuse ivresse
libre...

Coeur d'automne






Quand la forêt se prête aux forages intérieurs par le mélange d'épaisses foisons et de surprenantes nudités, mariées plus que jamais en ces moments d'automne où l'on s'étonne de trouver encore tant de lumière et de douceur...

lundi 12 novembre 2007

Pierres poreuses

Retrouver au Zinc Bleu la cathédrale de Beauvais, son infini réseau de pierres, son infini travail, sa majesté amputée par sa flèche effondrée, comme un arrêt divin rappelant aux hommes les limites à ne pas dépasser... Retrouver à ses pieds l'activité des piétons allant faire leur marché en ce samedi matin. Les imaginer mettant leurs pas dans les vieux pas perdus de tant de générations défilant en ces jours de marché. Et elles, ces pierres plus vivantes que tous ces vivants qu'elles ont tant vu passer, raides et souples en leurs rides, en leurs rideaux d'arceaux, nous font vibrer... Aujourd'hui, le parvis en chantier nous ramène plus que jamais aux chantiers d'épopée où les maçons se livraient leurs secrets, anonymes tailleurs d'ailleurs !

vendredi 26 octobre 2007

Paternité

L'homme s'est senti seul en voyant les deux corps séparés de si peu, corps de la femme aimée, et corps du petit homme venu de lui. Jamais il ne pourra faire autant. Jamais l'amour ne fera séjour au ventre pendant des jours et des semaines. Cet enfant s'est niché dans le profond repos que l'on n'atteindra plus. La femme s'est déchirée, scindée, et ce n'est pas pour lui.
Le petit va grandir en quêtant le regard de son père, cherchant sa vérité dans sa sévérité, cherchant à l'imiter, à mériter son amitié. Le père s'inquiète de cette quête qui le repousse vers le passé. Peur de périr, visage vieux, et de céder, de décéder, de ne plus décider...
Le père a peur de perdre
La face
Et la place.
La barricade,
La pauvre palissade,
Se dresse entre eux.
Étanche écran du temps
Perdu.
Le père dut se défendre au plus profond des certitudes.
Le fils dut s'affirmer par l'insolence des attitudes.
La ressemblance est à couteaux tirés,
Et la reconnaissance est à rideaux fermés.
Pas de passage,
Point de pas sages
De l'un à l'autre.
L'infini face-à-face et ça casse,
Débris sans bruit,
Maux à maux épelés
En tant d'années,
Temps d'années comptées,
Condamnées.
Damnés cons !

lundi 15 octobre 2007

Frou-frou de fleurs

Frêle et fraîche impudeur
Des fleurs
Ouvertes découvertes
Offertes
À nos regards
À nos hasards

Frissonnées chiffonnantes
Froissées ou foisonnantes
Frôlées
Défraîchies et sans fard
Au hasard
Des caresses qui fouettent

Et loin de se cacher
Si faiblement penchées
Dépuillent leurs pétales
Fripés
Avec cette impudeur
Sous nos regards

Dépérissent et se meurent
Les fleurs

Mot d'adieu

A Gudrun

Elle venait à peine de quitter un lieu qu'elle aimait pour une nouvelle vie qu'elle redoutait. Déplacement accepté, admis, tout juste. Subi, un peu.
Quelques jours de cette vie nouvelle, et le passé l'appelle, cruel : décès subit de la mère vieille, mais... c'est comme ça... on ne s'y attend pas... il n'y a pas eu d'adieu...
Rangement des affaires, tri douloureux des vieilles choses, souvenirs souterrains mis au jour...
Flux.
Des papiers entassés se détache un mot d'adieu inattendu, qui en dit plus que tout : une coupure de journal, soigneusement découpée, soulignée et collée, comme par un écolier. C'est l'annonce d'un reportage télévisé sur la ville où sa fille s'installe au moment-même où la mère se sent si lasse et faible... Une image de ce Sud-Ouest de la France, si lointain qu'elle ne le verra jamais. Mais où elle l'a suivie, pourtant. La preuve...

dimanche 14 octobre 2007

Maternité nous crée


Laure Ketfa me demande de présenter ses toiles tissées dans l'expérience, banale et toujours unique, de la maternité. Elles sont nourries de cette vie nouvelle qui s'est incorporée à la sienne, et l'a décuplée. Avec le bébé qui croît en elle, puis hors d'elle, sa vie se développe dans un nouveau temps et un nouvel espace, l'appelant vers l'inconnu, vers l'origine et ses mystères, vers l'avenir et ses questions. À ces interrogations immenses, Laure ose répondre à sa façon bien à elle, force et fragilité mêlées, matériaux collectés et collés, dessin maîtrisé, couleurs libérées, peinture intense qui nous invite à la poésie. On ne refuse pas une telle invitation !


Tête penchée sur les pensées poussées

Sur les pensées passées, l'oeil est passé

De l'une à l'autre. La mère s'efface

Et prend sa place l'enfant fouillant.

L'enfant fait face.

Fracas du temps fondu...


Dessine-moi, disait-elle sans trêve,

Dessine-moi l'oiseau si haut

L'oiseau des airs

Et chante-moi l'air des oiseaux.

Silence...

Où sont les mots ?

Les mots moutons

En troupeaux piétinent ma planète...

Dessine-moi plutôt

Le mouton que voilà

Son blanc silence

Et sa présence.


Destine-moi !


Voilà les mots en moi appelés par la douceur de ces tableaux aux couleurs fortes. Un arrachement vers le bonheur.

jeudi 11 octobre 2007

Nid vide

Ce coin devient un carrefour le jour où curieusement se croisent des vies.
Promenées, chahutées, les vies bringuebalées, existences en instance, évidences cassées Le vide se vit se voit vite dit se dévide le fil blanc fils et filles fragiles décousus de nous venus d'où
Le nid laissé berceau bercail
Le nid laissé vide là-bas dans la maison debout vide
Filetée d'araignées longues à défiler dévidant leurs pelotes idiotes sans se lasser du cliquetis sans bruit de leurs aiguilles lisses
Le nid vide en ses pierres posées loin
Attend
Entend
Les bruits oubliés
Les sons susurrés
Nous en allés

L'inouï de l'oubli

mardi 9 octobre 2007

Maternité

Mot plein comme l'état qu'il désigne, maternité nous fait entrer
Nous fait ancrer
Encrer
Créant
Le nouveau-né créant
En nous
Criant
En nous
Riant
De nous
Poussant
Pour nous
Vivant, ô vivant !
Croissant
Vers nous
Croyant
En nous
Confiant
En tous
Buvant, ô buvant !
Tout aimant
Ou dormant
Ou hurlant
Étonnant
Et
Serrant, ô serrant !

Maternité nous crée

Réveil matin

Ce matin, mes yeux ne s'ouvrent pas d'un clic. Le temps de l'ouverture, le temps pendant lequel se détachent les images de rêves qui se collent aux paupières et se fragmentent lentement, ce temps dure et s'étire en mots logés dans mes oreilles. Ouverture, comme à l'opéra ! Pour moi, une ouverture que je me joue au réveil, et qui contient les thèmes de la journée, ou des journées enchaînées. Ces mots sont étrangement prétentieux, c'est vrai, mais forts aussi, pour me dire : "La vie est le chemin vers Dieu", c'est ça, oui, c'est l'ouverture jouée sous la couverture. Curieux, non, ce viatique matinal venu d'on ne sait où ? Il a dissipé le souvenir du doux rêve qui l'a produit... Et tout-à-coup, tout me paraît très simple, il n'y a pas de questions à poser, à se poser, tout est résumé. Il n'y a qu'à suivre la via Sua, la vita suae, la tracer, l'accepter, la jouer...
A croire que ce matin, Dieu opéra !

lundi 8 octobre 2007

Pire en doutant

Pire de douter quand tout nous dit de
Pire de penser en doutant que
Dire que penser c'est somme toute
Pire que danser

Dire que pousser c'est tout comme
Penser sans s'en douter
Assoupi dans un somme
Sans même songer

Pire en doutant c'est de
Taire en passant les mots poussés
Passés tout en pensant tout en dansant
Les mots tassés sans s'en douter

Mise en pièces

Je pensais au mot pièce, me demandant si le fait de les mettre en pièces dépréciait le tissu de fibres, le tissu de mots, la masse monétaire, la force d'artillerie, ou si au contraire ce détachement du tout ne constituait pas leur acte de naissance.
Du lourd rouleau de tissu chamarré, le morceau arraché, la pièce, peut prendre liberté de tourner à la veste, à la jupe, au corsage, de prendre corps en un mot, et forme... Le tranchant des ciseaux, le piquant des aiguilles, le chatouillement du fil et la brûlure du fer tranchent et piquent, chatouillent et brûlent la trame qui prend vie sous ces coups, pour draper et couvrir, réchauffer, adoucir.... habiller !
Quand l'auteur s'autorise à tailler de sa plume dans l'infini ramage des conversations, des discussions, des affirmations, des dénégations, des contradictions, il trace un cadre de silence tout autour des répliques et tranche à vif dans le travail des bouches. De quel droit arrache-t-il les propos tenus, les ragots répandus, les sentiments déçus, à la trame des paroles enchaînées sur le métier des langues ? Les agencer comme les pièces d'un puzzle, les mettre en jeu, les mettre en joue, les mettre en pièces, dérision ? Décision plutôt, de les conduire ailleurs, hors d'atteinte du temps, choisies, belles, épousées. Tant pis pour leurs défauts !
Et dans la masse d'argent, qui taille et tranche pour mettre en pièces la monnaie qui nous plombe de son impondérable poids ? Qui nous pourvoie de ces petites pièces tintantes et brillantes, comme des jouets qu'on lance et roule, de ces soyeux papiers que l'on peut chiffonner comme si on s'en fichait ? Et ces cartes magiques ouvrant les coffre-forts ? Mise en pièces, la masse de la richesse nous appartient par bribes et par breloques, par bricoles et broutilles... Elles brillent !
Sur le front, prêtes à dépecer l'adversaire, pointent les pièces d'artillerie. Qui donc entaille et détaille la force de frappe, le front de feu, la ligne lisse ciselée de canons inégaux, spécialisés dans tel ou tel tir ? Ces failles, ces faiblesses, ces fissures font face .
Celui qui met en pièces nous tient à sa portée !

vendredi 5 octobre 2007

Beau sujet pour Sophocle

Ils ont atteint la cinquantaine, mes frères... et ce cap dépassé, l'un sombra. Ce n'était pourtant pas le navigateur, le pirate, plutôt le bureaucrate, l'homme à cravate. L'un voulait défendre la terre, l'autre la France. Des ambitions peu communes, en quelque sorte, et qui souvent divergent. Longtemps frères ennemis, ils se livraient des duels, non pas sous les remparts de Thèbes comme les frères d'Antigone, mais sur les antennes de télévision, dans les colonnes de journaux. Entre eux deux, un grand silence, un no-man-land, quelque chose de tu comme une douleur, quelque chose de su comme un malheur. Entre eux deux, les absences : un bébé étouffé, une maman explosée. Il faut apprendre à se défendre et à défendre ce qui est fragile, et ce qui ne devrait pas l'être. Moi, tard venue, défends les lettres et les couleurs anti-douleurs. Trois enfants d'avocats, trois défenseurs, mais agressifs. À la pointe, c'est l'aîné, qui tire et pointe haut, et nous met la barre haut, très haut. Il est en guerre, il lui faut trouver et prouver sa vérité, s'épuiser. Et c'est l'attaque. Son adversaire le terrasse, et c'est lui-même, qui se rebelle d'être si mal traité... Lui, notre explicateur, lui le grand discoureur, le voilà sans le secours des mots, accablé sous les maux. Le voilà sans défense. L'enfant reparaît, le petit étouffé. Comment l'aider ?

Jouer à casse-casse

Un tour de passe-passe, ce jeu de casse-casse ! C'était sur un sentier d'été, là, dans les Pyrénées, un sentier arpenté tant de fois que l'on n'y prend plus garde, aux trous bien ravinés ravivant les foulures refoulées, aux cailloux-choux-hiboux qui vous prennent aux genoux, et clac, et crac, vous tournent et vous retournent... "Tire la bobinette et la chevillette cherra", dit-on au chaperon. La voilà chue, ma cheville, la voilà sue, ma blessure ! qu'il est dur de se traîner le pied dressé, au pied levé, et que ça dure, et que ça dure... L'été passé, le pied cassé, quel pied de nez ! les barreaux ne se voient pas, dans cette cage. Ce sont les mots, dans toutes ces pages, qui les effacent. D'un bond, l'esprit vagabond, au long de ces jours longs, embarque et divague à son gré, tandis que le corps empêtré dans son plâtre s'ankylose doucement. Jeu de casse-casse et de passe-passe. Si souvent l'esprit s'englue dans le corps qui remue. Voilà, pour une patte cassée, les rôles inversés !